goodkarma
 
 
 
  24, 25 & 26 août 2007  
Rock en Seine
(Domaine national de Saint-Cloud)

Pour cette cinquième édition Rock en Seine avait vu les choses en triple. Trois scènes désormais habituelles, mais cette fois-ci sur trois jours, du vendredi au dimanche soir. Certainement la meilleure façon de faire son entrée dans le cercle fermé des grands festivals, tout comme son budget, 3,5 millions d’euros et sa fréquentation, environ 65 000 spectateurs en trois jours (au lieu des 70 000 espérés). C’est donc une affiche alléchante qui était présentée cette année, entre talents attendus (Arcade Fire), sur le retour (The Jesus And Mary Chain) ou fraichement révélés (The Noisettes).

Tout commence donc le vendredi dans la boue, suite à la météo on ne peut plus capricieuse au dessus de l’Île de France depuis le début de l’été. Mais le public parisien s’en moque et sort quand même en jean slim et converse au risque de salir ses chaussures préférées. Les classieux The Shins ouvre le bal avec une impeccable pop aux faux accents de Beach Boys maîtrisée avec soin. Petit moment de bonheur, tout s’annonce pour le mieux. Émilie Simon enchaine ensuite pour le dernier concert de sa tournée marathon. Grâce et légéreté caractérisent le mieux son set, toujours accompagné par un excellent groupe, entre rock et expérimentation electronique. Mais The Hives nous sort de notre torpeur (il commence presque à faire chaud) pour enflammer la grande scène acquise au groupe. Energie punk et rage toute rock’n’roll pour les Suédois survoltés. Mais c’était sans compter avec The Noisettes, certainement l’une des révélation du festival. Attendu au tournant depuis le début d’année et la sortie de son premier album, le power trio a confirmé tout le bien que l’on pensait de lui, notamment grâce à son incroyable chanteuse/bassiste Shingai Shoniwa. Ils réussissent même l'exploit de faire bouger Philippe Manoeuvre qui se comporte comme une vraie groupie, téléphone portable à la main pour prendre des photos. Une nouvelle valeur sûre dans le petit monde des groupes de rock. Mais 2 Many DJ’s viennent déjà prendre le relais sur la scène d'en face pour un set electro-rock déchaîné, mais jouant toujour autant dans le registre de l’esbrouffe : mélodie connue (YMCA ou Joe le Taxi) appuyé par un pied électronique des plus simpliste. Rien de nouveau sous le soleil (qui pointe alors le bout de son nez), mais ça marche et la foule est en délire. De quoi chauffer tout le monde pour les très attendus Arcade Fire qui n’ont pas failli à leur réputation. Une petite dizaine de musicien sur scène, de la guitare électrique à l’accordéon en passant par la viele à roue, c’est un joyeux bordel que nous proposaient les Canadiens, qui réalisent là un set impeccable et intense. Pourtant UNKLE arrive a rivaliser en intensité grâce à de nouvelles compositions denses et brillament défendues devant son public. La grande classe pour un retour en force de la formation de James Lavelle, trop vite oubliée.

Samedi, le beau temps revient, la boue s’assèche et les tongs commencent à pointer leur nez. Tout comme les Cold War Kids appelés à la rescousse suite à la défection toxicologique d’Amy Winehouse. On se demande au final si on y gagne au change suite à une prestation honnête mais peu enthousiasmante. Tout le contraire du trompettiste Erik Truffaz. Programmé dans un festival de rock, le Suisse trouve sa place grâce à l’appui du grand Ed Harcourt, venu défendre leur collaboration en chair et en os, mais aussi grâce à des musiciens talentueux. Jarvis Cocker nous surprend encore plus grâce à un charisme hors du commun, même sans Pulp il n’a rien perdu de sa verve et de son humour tout anglais. Définitivement un très grand, même en reprenant du Black Sabbath. Les Brésilennes de CSS nous semblent en comparaison un peu fades malgré leur énergie, mais aussi à cause d’un son quelque peu faiblard. Les paillettes et les combinaisons fluos ne changeront pas grand chose à la donne. C’est avec d’autant plus de plaisir qu’on retrouvera les incontournables et mythiques The Jesus And Mary Chain pour certainement l’un des concerts les plus intenses du festival. Si les frères Reid se sont calmés, ils n’ont par contre pas abattu leur « wall of sound » si réputé, jusqu’à s’en déchirer les tympans. Toute guitare et larsens en avant, les Ecossais font honneur à leur carrière et leur retour s'annonce comme l'une des meilleures nouvelles de l'année. En conséquence de quoi les Rita Mitsouko font pâle figure et ne réussisent à mettre le feu qu’avec leurs grands classiques toujours aussi efficaces. Rien que pour ça, respect à eux. Tool se trouve donc bien loin de leur univers, heavy metal progressivo-psychédélique, son à décorner des bœufs et visuels angoissants, le tout executé avec talent. Pas tout le monde aime, mais il faut reconnaître que les puristes ne peuvent qu’apprécier un tel show. On refroidira donc ses oreilles, avec les très calmes Alpha, qui font honneur à leur réputation de groupe le plus soul de la scène trip hop.

Dimanche, dernier jour, les bermudas sont définitivement de sortie, d’après les looks stylés, on sent que Paris est de l’autre côté de la Seine. Le soleil nous fait une nouvelle fois l’honneur de sa présence tout comme la diva R’n’B Kelis. L’épouse de Nas fait enfin bouger le public parisien qui, une fois n’est pas coutume, semble avoir envie de danser aujourd’hui. Groupe solide, choriste indispensable, on regrette seulement ses vocalises parfois trop appuyées. Albert Hammond Jr. Casse ensuite un peu l’ambiance avec son rock très (trop ?) proche des Strokes, on sent que le bonhomme n’est pas étranger au groupe. On lui préférera le très british Just Jack et sa pop teinté de funk et de hip hop. Si le garçon n’a pas inventé la poudre (Phoenix et The Streets doivent avoir les oreilles qui sifflent), il a au moins le mérite de garder la flamme chez les danseurs. Faithless continuera à l’entretenir grâce à une prestation live solide. Malgré un style pas toujours subtil, la formation reste un très bon groupe dance de scène. A côté d’eux Craig Armstrong paraît presque trop rafiné mais sa musique reste bizarrement un peu trop creuse, alors que le pianiste est l’un des arrangeurs les plus en place du moment, dommage. Au final tout ces groupes avaient presque peu d’importance face à celle que tout le monde était venue voir ce soir là. Encore une fois Björk faisait sa star et arrivait à remplir une soiréee rien que sur son nom. Et encore une fois sa prestation fut éblouissante alors que son dernier album est, de l’avis général, plus que moyen. Encore une fois l’Islandaise arrive à magnifier sur scène des titres pas toujours réussis, l’éblouissant Wanderlust peu en témoigner. Mais les chansons plus anciennes sont aussi de la partie ( Joga, Five years, Army of me et même Anchor song) réinterprétées de main de maître par l’éblouissante fanfare féminine et le fidèle Mark Bell aux machines plus folles que jamais. Ce dernier n’est d’ailleurs pas étranger à la furie techno qui clotura le concert (Hyper ballad, Pluto et Delclare independance). Une vraie leçon de musique qui prouve encore une fois que Björk sait toujours se réinventer et nous prendre par surprise, sutout lorsque l’on s’y attend le moins.

Cette cinquième édition fut donc un cru abouti, ne reste plus qu’au public à se débrider pour que l’on obtienne enfin une vraie ambiance de festival aux portes de Paris. Ce qui est encore loin d’être le cas.

Posté le 28/08/2007
Rock en Seine

Concert
Rock en Seine
2007

 
© Jean-Sébastien Zanchi